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ROME – Qualifiant cette décision d ‘“incompréhensible”, le Vatican a confirmé samedi que son représentant au Nicaragua avait été expulsé par le gouvernement du président Daniel Ortega.
Un communiqué indique que le Vatican a reçu “avec surprise et tristesse” une communication selon laquelle le gouvernement nicaraguayen a décidé de retirer l’acceptation diplomatique de l’archevêque polonais Waldemar Stanislaw Sommertag, qui est nonce ou ambassadeur du pape dans le pays depuis 2018.
Selon le Vatican, il a été contraint » de quitter le pays immédiatement après l’avoir informé de cette mesure.”
Bien que le Vatican ait officiellement qualifié le déplacement d ‘ »incompréhensible », des sources ont dit Crux qu’ils considéraient une telle démarche comme une possibilité depuis le 18 novembre 2021, lorsque le gouvernement nicaraguayen a annulé par décret la figure de “doyen du corps diplomatique”. Dans la plupart des pays à majorité catholique, le nonce papal est traditionnellement doyen du corps diplomatique.
Sommertag a été démis de ses fonctions de doyen peu après avoir commencé à utiliser le terme de “prisonniers politiques”, ce qu’il avait évité au cours des trois années précédentes lorsqu’il avait servi d’interlocuteur en coulisses entre le gouvernement et les familles de personnes emprisonnées par le gouvernement Ortega.
Parmi les personnes détenues figurent tous les candidats de l’opposition qui avaient exprimé leur intention de se présenter contre Ortega aux élections présidentielles de l’année dernière.
Dans sa déclaration, le Vatican a salué le travail de médiation de Sommertag pour la libération de nombre de ces dirigeants politiques.
La ”disposition est incompréhensible car, au cours de sa mission, “Sommertag » a travaillé sans relâche pour le bien de l’Église et du peuple nicaraguayen, en particulier pour les plus vulnérables, cherchant toujours à favoriser de bonnes relations entre le Siège apostolique et les Autorités du Nicaragua.”
“Sa participation en tant que témoin et accompagnateur de la Table de Dialogue national entre le Gouvernement et l’opposition politique, en vue de la réconciliation nationale et de la libération des prisonniers politiques, mérite une mention particulière”, a déclaré le Vatican.
Habituellement, lorsqu’un ambassadeur est expulsé d’un pays, l’autre nation expulse également l’envoyé du premier. Cependant, l’ambassadrice du Nicaragua Eliette Ortega Sotomayor a quitté son poste en août 2021 après seulement six mois et Ortega ne l’a jamais remplacée, le rôle est donc vacant.
La situation entre l’Église et l’État a longtemps été tendue au Nicaragua, mais elle est devenue encore plus compliquée pendant et après une révolte civile en 2018. L’étincelle qui a allumé le feu de la protestation de masse a été l’annonce par le gouvernement de modifications du système de retraite qui auraient eu un impact profondément négatif sur les personnes âgées.
Depuis le soulèvement de 2018, des églises catholiques ont été attaquées, y compris la cathédrale de Managua en 2020. En 2019, l’évêque auxiliaire de Managua, Silvio José Báez, a été contraint de quitter son diocèse à la demande du pape François après avoir reçu plusieurs menaces de mort.
L’année dernière, les Ortegas ont qualifié les évêques de “putschistes”, de “descendants du diable”, d’“agents étrangers” et les ont également accusés de prêcher un faux christianisme. Ils ont dépêché des policiers pour intimider les évêques et les prêtres, installant même une cabine de police en face du domicile du cardinal Leopoldo Brenes Solorzano, archevêque de Managua.
On ne sait pas si Ortega et son épouse, la vice-présidente Rosario Murillo, accepteraient un autre nonce papal, mais des sources ont dit Crux que, à ce stade, le Vatican n’envisage pas d’envoyer un remplaçant.
La persécution accrue de la hiérarchie catholique locale a mérité l’attention de la Commission américaine pour la Liberté religieuse internationale. La situation place le Vatican dans une situation tendue, car les évêques du pays ont longtemps été reconnus comme les seules voix “d’opposition” à ne pas avoir été emprisonnés.
L’expulsion de Sommertag laisse ces prélats plus sans protection, c’est pourquoi l’ambassade du Vatican au Nicaragua devrait rester ouverte malgré l’absence d’ambassadeur, au moins aussi longtemps que le gouvernement le permet.
Suivez Inés San Martín sur Twitter: @inesanma